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Exclure les lois constitutionnelles du domaine de l’art.11

— PROPOSITION SUR L’ARTICLE 11 —

Rédacteur(s)

BLACHÈR Philippe

Avec la collaboration de :

BALNATH Mohesh, BOISSEAU Diane

Proposition(s)

XI. Revoir les modalités de révision constitutionnelle

85.A Exclure les lois constitutionnelles du domaine de l’art. 11

Révision de l’article 11 pour expressément exclure de son champ la révision constitutionnelle.

1. Les dysfonctionnements ou lacunes du droit positif

  • En 1962, ni le Conseil d’Etat ni le Conseil constitutionnel n’ont pu, en dépit de deux avis défavorables, empêcher le recours à la procédure de l’article 11 pour réviser la Constitution.
  • Le possible usage de la procédure de l’art.11 pour adopter une loi constitutionnelle (LC) viole l’article 89 C. De plus, il conduit à gommer deux distinctions : celle entre la loi (au sens du droit positif, ordinaire ou organique) et la loi constitutionnelle (LC) et celle entre le législateur ordinaire/organique (organe constitué) et le législateur constitutionnel (organe constituant). Ce double « écrasement » résulte d’une assimilation discutable entre le peuple qui s’exprime au moment de la consultation référendaire et le souverain.
  • Comme toute loi, la LC est une procédure et le résultat de cette procédure. Dans son sens procédural, la LC correspond à la « Loi adoptée selon la procédure spéciale prévue par la Constitution pour sa révision au titre du pouvoir constituant dérivé » (Avril et Gicquel, Lexique de droit constitutionnel, 2021). L’auteur de la LC (appelé parfois le pouvoir de révision ou pouvoir constituant dérivé, on préfèrera l’expression législateur constitutionnel) n’est pas le même que celui de la loi ordinaire ou organique (le législateur ordinaire/organique). Afin de distinguer le législateur constitutionnel du législateur ordinaire/organique, la Constitution aménage la procédure spéciale d’adoption de la LC. Cette procédure est prévue par le titre XVI de la Constitution de 1958 (« De la révision ») composé d’un unique article (art. 89 C.).
  • Le précédent de la LC 62-1292 du 6 novembre 1962 pourrait à nouveau se produire, même si le Conseil d’État, depuis l’arrêt du 30 octobre 1998 Sarran, Levacher et autres, considère que « la matière législative » concerne « les cas prévus par l’article 11 » et « la matière constitutionnelle » est réservée à la procédure de l’article 89. La particularité d’une révision empruntant le canal de l’article 11 tient au fait qu’il exclut le Parlement du processus d’adoption de la LC, même si les deux assemblées disposent de l’initiative référendaire au même titre que le Gouvernement, et qu’il nie – comme on l’a vu plus haut – la distinction fondamentale entre la procédure constituante et la procédure législative

2. Le remède : la proposition

  • Il est proposé d’ajouter une mention dans le premier alinéa de l’article 11 de la Constitution pour interdire d’emprunter la voie référendaire de l’article 11 en lieu et place de la voie référendaire de l’article 89 C.

3. Les effets escomptés et leur justification

  • Cette proposition, qui exclut la voie de l’article 11 en matière d’adoption d’une LC, n’interdit pas au président de la République d’organiser un référendum pour réviser la Constitution : elle l’invite cependant à suivre la procédure de l’article 89 qui suppose une étape intermédiaire entre l’initiative présidentielle et la consultation référendaire. A la logique « bonapartiste » du référendum de l’article 11 se substitue une procédure plus complexe et respectueuse de l’ensemble des composantes du « pouvoir constituant » (exécutif, assemblées parlementaires et peuple).
  • Cette proposition justifie un contrôle « modéré » (Olivier Beaud, Les Cahiers du CC, 2010) du Conseil constitutionnel pour statuer sur la conformité constitutionnelle d’une révision : un contrôle préventif ; un contrôle procédural.

Article 11

Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux assemblées, publiées au Journal officiel, peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d’un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions.

Article 11

Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux assemblées, publiées au Journal officiel, peut soumettre au référendum tout projet de loi, à l’exclusion d’un projet de loi constitutionnelle, portant sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d’un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions.