1. Les dysfonctionnements ou lacunes du droit positif
L’entrée en fonctions du nouveau président se fait dès son investiture, qui consiste, entre autres événements, à s’entretenir avec le président dont le mandat s’achève.
La cérémonie d’investiture peut avoir lieu dès la proclamation officielle des résultats de l’élection jusqu’au dernier jour du mandat du président en exercice. En moyenne, depuis 1974, la durée observée entre la proclamation officielle et l’entrée en fonctions du nouveau président a oscillé entre 8 et 13 jours.
Cette période apparaît particulièrement brève, surtout si l’on compare à ce qu’il se passe aux États-Unis d’Amérique (11 semaines) ou encore au Brésil (8 semaines). Le problème que cela soulève est que le nouveau président et sa nouvelle équipe (pour l’Élysée comme pour Matignon) disposent dès lors de peu de temps pour se remettre de la campagne électorale, muer de candidat à élu, et surtout pour prendre connaissance des dossiers en cours comme du fonctionnement des services et affaires de l’État.
L’argument avancé pour justifier le caractère bref de cette période de transition est la garantie de la continuité de la Nation et de l’État. Toutefois, il est permis de penser que la continuité serait bien mieux assurée si la nouvelle équipe avait le temps d’être « formée » sur les dossiers en cours, en particulier sur ceux relatifs à la sécurité intérieure comme extérieure de l’État, plutôt que d’être obligée à se former « sur le tard », et, souvent, à partir de fichiers partiels, manquants ou détruits, ou de matériel informatique endommagé à dessein.
2. Le remède : la proposition
Allonger le délai pour l’entrée en fonctions présente bien évidemment quelques inconvénients. Ainsi par exemple, celui de faire cohabiter un président élu ayant encore les pouvoirs mais n’étant plus légitime et un président nouvellement élu, légitime mais impuissant (problème du « Lame duck », « canard boiteux », connu aux États-Unis d’Amérique).
Une telle proposition n’est toutefois pas dépourvue d’avantages, présentés ci-après (point 3).
Il est proposé de modifier l’article 7 de la Constitution, celui-ci paraissant, de tous les articles existants, le plus approprié, en jouant sur la date de l’élection, prévue suffisamment en amont par rapport à l’expiration des pouvoirs du Président en exercice, laquelle est alors liée au renouvellement de l’Assemblée nationale.
D’une part, il est ainsi proposé que la date d’expiration des fonctions de l’Assemblée nationale soit le troisième mercredi de juin (soit entre le 15 et le 21 juin) et que les élections législatives aient lieu entre 8 et 20 jours avant cette fin des fonctions. Le premier tour devrait alors avoir lieu, au plus tôt, le dimanche 29 mai et le second tour aurait lieu, au plus tard, le dimanche 18 juin.
D’autre part, il est proposé que les fonctions du Président de la République en exercice expirent au plus tard le quatrième mercredi de juin (soit entre le 22 et le 28 juin) et que le Président élu soit investi entre un et huit jours après la proclamation des résultats des élections législatives. L’investiture aurait ainsi lieu, au plus tard (cas d’un deuxième tour des élections législatives le 18 juin) entre le 20 juin et le 28.
Par conséquent, il est proposé que l’élection du Président de la République ait lieu entre cinquante-cinq jours au moins et soixante-dix jours au plus avant l’expiration des pouvoirs du Président en exercice, soit dans le courant du mois d’avril.
Les modalités précises de la transition résulteront alors soit de bonnes pratiques, sous l’égide, notamment, du SGG, soit pourront être régies par voie réglementaire.
Par ailleurs, il est proposé également d’allonger le délai pendant lequel une nouvelle élection du Président de la République doit être organisée, en cas de fin inopinée du mandat (vacance ou empêchement définitif), afin d’éviter que l’élection doive être programmée à une période où les électeurs sont peu disponibles (notamment les mois d’été). La nouvelle élection doit ainsi avoir lieu entre quarante-cinq jours au moins et cent trente jours au plus après l’ouverture de la vacance ou la déclaration du caractère définitif de l’empêchement. Étant donné que la fin normal du mandat présidentiel est prévu à une date fixe, dès la fois suivante, le calendrier ordinaire s’appliquera de nouveau.
3. Les effets escomptés et leur justification
Plusieurs effets pourront être attachés à l’allongement de la durée de l’entrée en fonctions du président.
En premier lieu, l’entrée en fonctions correspondra avec la mise en place d’une nouvelle majorité parlementaire, ce qui évitera au Président nouvellement élu d’avoir à nommer un Gouvernement temporaire, souvent attentiste car dans l’expectative du résultat des élections législatives. Ainsi, le Président et le nouveau Gouvernement pourront agir pleinement dès leur entrée en fonctions. Au surplus, cette modification permet que l’équipe gouvernementale soit investie par le pouvoir législatif, comme cela est proposé par plusieurs membres du GRECI.
En deuxième lieu, le délai d’un mois et demi sera utile au nouvel élu, à sa nouvelle équipe et à son futur Gouvernement à divers titres. Il leur sera possible de clore définitivement la période de la campagne électorale tout en travaillant à la construction de l’unité nationale. Une période de transition plus longue donnerait en effet au nouvel élu un temps nécessaire pour se remettre de la campagne électorale et commencer ensuite son mandat, « reposé ». Par ailleurs, cela lui donnerait un temps de réflexion utile pour saisir les équilibres politiques et thématiques à prendre en compte et réfléchir aux personnes qui composeront son gouvernement et son équipe. Dès lors, la nouvelle équipe pourra prendre pleinement connaissance de l’ensemble des dossiers, de leurs enjeux et des rouages de l’administration.
In fine, ce délai allongé devrait permettre de limiter l’impact des erreurs faites en début de mandat (souvent par méconnaissance), et conduire les nouveaux président et gouvernement à être efficaces dès le premier jour d’exercice de leurs fonctions. La continuité de la Nation et de l’État, dès lors, en ressortira renforcée.
Article 7
Le Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés. Si celle-ci n’est pas obtenue au premier tour de scrutin, il est procédé, le quatorzième jour suivant, à un second tour. Seuls peuvent s’y présenter les deux candidats qui, le cas échéant après retrait de candidats plus favorisés, se trouvent avoir recueilli le plus grand nombre de suffrages au premier tour.
Le scrutin est ouvert sur convocation du Gouvernement.
L’élection du nouveau Président a lieu vingt jours au moins et trente-cinq jours au plus avant l’expiration des pouvoirs du président en exercice.
En cas de vacance de la Présidence de la République pour quelque cause que ce soit, ou d’empêchement constaté par le Conseil constitutionnel saisi par le Gouvernement et statuant à la majorité absolue de ses membres, les fonctions du Président de la République, à l’exception de celles prévues aux articles 11 et 12 ci-dessous, sont provisoirement exercées par le président du Sénat et, si celui-ci est à son tour empêché d’exercer ces fonctions, par le Gouvernement.
En cas de vacances ou lorsque l’empêchement est déclaré définitif par le Conseil constitutionnel, le scrutin pour l’élection du nouveau Président a lieu, sauf cas de force majeure constaté par le Conseil constitutionnel, vingt jours au moins et trente-cinq jours au plus après l’ouverture de la vacance ou la déclaration du caractère définitif de l’empêchement.
Alinéas suivants sans modifications
Article 7
Article 25
Une loi organique fixe la durée des pouvoirs de chaque assemblée, le nombre de ses membres, leur indemnité, les conditions d’éligibilité, le régime des inéligibilités et des incompatibilités.
Elle fixe également les conditions dans lesquelles sont élues les personnes appelées à assurer, en cas de vacance du siège, le remplacement des députés ou des sénateurs jusqu’au renouvellement général ou partiel de l’assemblée à laquelle ils appartenaient ou leur remplacement temporaire en cas d’acceptation par eux de fonctions gouvernementales.
Une commission indépendante, dont la loi fixe la composition et les règles d’organisation et de fonctionnement, se prononce par un avis public sur les projets de texte et propositions de loi délimitant les circonscriptions pour l’élection des députés ou modifiant la répartition des sièges de députés ou de sénateurs.