1. Les dysfonctionnements ou lacunes du droit positif
Lors de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, l’obligation d’étude d’impact a été constitutionnalisée à l’alinéa 3 de l’article 39 de la Constitution par renvoi à une loi organique. En l’état actuel du droit positif, cette obligation n’est pas scrupuleusement respectée par le Gouvernement. Les études d’impact présentées par ce dernier, souvent lacunaires et rédigées tardivement, n’éclairent pas véritablement le processus d’élaboration de la loi.
2. Le remède : la proposition
Afin d’améliorer la qualité des études d’impact, il convient d’encadrer plus précisément les conditions de leur élaboration et prévoir un contrôle plus étroit de leur conformité aux exigences fixées par la loi organique.
Dans la nouvelle rédaction qui est proposée, l’article 39 alinéa 3 de la Constitution renvoie au législateur organique le soin d’encadrer, non seulement la présentation, mais également la préparation des projets de loi. Une telle modification permettrait d’imposer au Gouvernement le respect d’exigences complémentaires lors de la phase gouvernementale du processus législatif, comme l’organisation d’un débat d’orientation préalable devant chaque assemblée autour de l’avant-projet de loi et du canevas d’étude d’impact, ou encore d’une consultation publique en ligne. La modification de la loi organique sera également l’occasion d’institutionnaliser un organisme d’expertise indépendant chargé de la certification de la qualité des études d’impact.
L’article 39 alinéa 4 nouvellement rédigé contient deux innovations. D’une part, il attribue un droit de refuser l’inscription d’un projet de loi à l’ordre du jour en cas de méconnaissance des règles fixées par la loi organique à l’équivalent de soixante députés ou soixante sénateurs en Conférence des présidents. L’attribution d’un tel droit à l’opposition parlementaire contraindra le Gouvernement à faire preuve de plus de rigueur dans la préparation et la présentation des projets de loi et de leur étude d’impact. D’autre part, l’article 39 alinéa 4 renforce les exigences pesant sur le Conseil constitutionnel dans l’hypothèse où il serait invité à se prononcer sur la qualité de l’étude d’impact. Une telle modification s’impose dans la mesure où, en l’état actuel du droit positif, le Conseil refuse d’exercer un réel contrôle de la conformité des études d’impact aux exigences fixées par la loi organique.
3. Les effets escomptés et leur justification
Les différentes modifications proposées, qui devront s’accompagner d’une modification de la loi organique à laquelle renvoient les alinéas 3 et 4 de l’article 39, devraient favoriser la diffusion d’une véritable « culture de l’étude d’impact » au sein du Gouvernement. À terme, il est permis d’escompter l’adoption de lois de meilleure qualité. Ainsi que l’énonce Jean-François Perrin, « la norme juridique constitue nécessairement un choix politique ». Pour autant, parmi ces choix, « il y a ceux qui sont effectués par des décideurs qui se sont donné la peine de réfléchir aux conséquences de leurs décisions et il y a ceux qui émanent d’auteurs normatifs qui se prétendent détenteurs d’une vérité a priori, persuadés qu’ils sont de savoir faire le bien des destinataires, sans se donner la peine d’analyser les perceptions et les conceptions de ceux au profit desquels ils agissent »[1].
[1] J.-F. Perrin, « Possibilités et limites d’une science de la législation », in P. Amselek (dir.), La science de la législation, PUF, 1988, p. 31.
Article 39
L’initiative des lois appartient concurremment au Premier ministre et aux membres du Parlement. Les projets de loi sont délibérés en conseil des ministres après avis du Conseil d’État et déposés sur le bureau de l’une des deux assemblées. Les projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale sont soumis en premier lieu à l’Assemblée nationale. Sans préjudice du premier alinéa de l’article 44, les projets de loi ayant pour principal objet l’organisation des collectivités territoriales sont soumis en premier lieu au Sénat.
La présentation des projets de loi déposés devant l’Assemblée nationale ou le Sénat répond aux conditions fixées par une loi organique.
Les projets de loi ne peuvent être inscrits à l’ordre du jour si la Conférence des présidents de la première assemblée saisie constate que les règles fixées par la loi organique sont méconnues. En cas de désaccord entre la Conférence des présidents et le Gouvernement, le président de l’assemblée intéressée ou le Premier ministre peut saisir le Conseil constitutionnel qui statue dans un délai de huit jours.
Dans les conditions prévues par la loi, le président d’une assemblée peut soumettre pour avis au Conseil d’État, avant son examen en commission, une proposition de loi déposée par l’un des membres de cette assemblée, sauf si ce dernier s’y oppose.
Article 39
L’initiative des lois appartient concurremment au Premier ministre et aux membres du Parlement. Les projets de loi sont délibérés en conseil des ministres après avis du Conseil d’État et déposés sur le bureau de l’une des deux assemblées. Les projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale sont soumis en premier lieu à l’Assemblée nationale. Sans préjudice du premier alinéa de l’article 44, les projets de loi ayant pour principal objet l’organisation des collectivités territoriales sont soumis en premier lieu au Sénat.
La préparation et la présentation des projets de loi déposés devant l’Assemblée nationale ou le Sénat répondent aux conditions fixées par une loi organique.
Les projets de loi ne peuvent être inscrits à l’ordre du jour si, au sein de la Conférence des présidents de la première assemblée saisie, un ou plusieurs présidents de groupe parlementaire représentant au moins soixante députés ou soixante sénateurs constate que les règles fixées par la loi organique sont méconnues. En cas de désaccord entre ces présidents de groupe parlementaire de la Conférence des présidents et le Gouvernement, le président de l’assemblée intéressée ou le Premier ministre peut saisir le Conseil constitutionnel. Ce dernier se prononce sur le respect de chaque règle fixée par la loi organique dans un délai de quinze jours.
Dans les conditions prévues par la loi, le président d’une assemblée peut soumettre pour avis au Conseil d’État, avant son examen en commission, une proposition de loi déposée par l’un des membres de cette assemblée, sauf si ce dernier s’y oppose.